Pages

jeudi 4 février 2010

Il ne s'agit pas de faire ici une étude sociologique ou historique, parce que je ne suis ni sociologue, ni historienne. Mais, je crois qu'à travers l'histoire d'une famille on peut déjà voir le processus du changement mental des habitants d'un pays comme la Russie. La Russie n'a pas beaucoup changé du point de vu de la fermeté du pouvoir central, c'était une dictature sous Staline, puis on a glissé vers l'autoritarisme. ...Et on y reste toujours. C'est le contenu idéologique qui a changé. Par contre, on est passé du "communisme" (ou socialisme) au capitalisme, ce qui est un grand changement.
Je me souviens bien d'un 1e mai du début des années 80. A l'époque nous habitions en Biélorussie. J'étais encore une enfant. Le 1e mai étant jour férié (et le 2 mai aussi), mes parents sont restés à la maison. Nous avons fait la grasse matinée, puis, sans se lever "complètement", on a branché la télévision pour voir la manifestation du 1 mai en direct de la Place Rouge à Moscou. D'abord, c'était une parade militaire sur la Place Rouge: des tanks, des voitures militaires... des soldats défilant en uniforme de fête. Les dirigeants soviétiques sur la tribune du Mausolée (de Lénine), l'immense foule encadrant la Place Rouge, des Moscovites et des provinciaux venus exprès pour voir la parade, avec des petits drapeaux rouges, les visages heureux. C'était tellement beau! Nous avons passé toute la matinée en regardant la parade, allongés dans le lit (nous habitions dans un appartement d'une seule pièce). C'était une fête. Je ne sais pas ce que pensaient mes parents, ils se détendaient tout simplement, fatigués par leur travail. Et moi, j'avais un très fort sentiment de fête. Le commentateur à la télévision parlaient d'une voix si solennelle, la parade était si belle, les mots prononcés sur l'Union soviétique étaient si pathétiques... que je me souviens d'avoir pensé: que je suis heureuse d'être née et de vivre en Union Soviétique! Que j'ai de la chance! Il y a beaucoup d'enfants dans le monde qui n'ont pas cette chance, et moi... je l'ai!
J'avais 4 ans...
Maintenant j'ai 30 ans, et je suis heureuse de ne plus vivre dans ce pays... Oui, Monsieur Sadovnichy, CE pays, hélas! Je me rappelle bien votre discours de souhait de bienvenue aux nouveaux étudiants de la faculté des langues étrangères à MGU (Université Lomonosov) en 1996, où vous avez dit qu'il fallait faire de la sorte que la Russie devienne NOTRE pays, "et non CE pays, comme disent maintenant certains politiciens". Et bien, je n'ai pas su le faire.
Quelle grande différence entre ce bonheur et cette fierté débordants d'une enfant de 4 ans et ce goût d'amertume d'une femme de 25 ans prenant un aller simple à destination de la France le lendemain de sa soutenance de thèse!
Que de changements en 20 ans!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire